mardi 6 mai 2008

L’histoire vraie d’un homme qui voulait devenir berger

Etienne H. Boyer, auteur de
"Mauvais Berger!",
Photo par Sarah Hutter pour
le Journal du Pays Basque
"Il fallait que ça sorte!", clame le jeune auteur, visiblement soulagé d'avoir couché sur le papier cette "tranche de vie". Etienne H.Boyer est arrivé en Soule en 1998 avec son épouse afin d'y suivre une formation agricole. Mais après deux stages réalisés dans les estives, il s'est rendu à l'évidence, il ne sera jamais berger.

Ce récit autobiographique illustré, édité par l’association Astobelarra, parle de la dureté du métier, mais aussi et surtout de harcèlement moral et de désillusion. Si les caricatures dessinées par l'auteur lui-même apportent une touche d'humour, le style descriptif et le langage parfois cru donnent un ton réaliste à ce récit sans concession.

Originaire de Charentes, Etienne H.Boyer a vécu sept ans à Bordeaux avant de venir s’installer en milieu rural. Comme beaucoup de citadins qui passent leurs vacances dans les Pyrénées, il avait une vision idyllique du métier de berger transhumant. Tenté par le "retour à la terre", Etienne a suivi une formation de berger à Menditte, dans le canton de Mauléon. "C'est là que j'ai commencé à me rendre compte que ce n’était pas un métier facile, reconnaît l'écrivain: travailler 16heures par jours et être payé au raz des pâquerettes... Mais j’aurais peut-être supporté la dureté du travail si j’étais tombé dans un milieu plus accueillant".

Ainsi commence l'histoire du "mauvais berger" : Etienne trouve un stage dans une exploitation béarnaise, chez "Nanette", la bergère acariâtre et son fils Christophe, avec qui il avait, au départ, un projet d'association. Les noms des protagonistes et des lieux sont d’emprunt.

Humilié


"Je suis mal tombé, mais cela aurait pu se passer n’importe où", remarque l’auteur. En dépit des difficultés rencontrées lors du premier stage, Etienne y fera une deuxième session l'année suivante, avant d’obtenir son diplôme, preuve d'une certaine volonté d'aller jusqu’au bout. "J’ai eu la sensation d’être humilié en permanence, d’être ridicule, d’être exploité. C’était du harcèlement moral et physique. Voilà comment je suis passé du p’tit gars optimiste au gars cynique". Il lui a fallu plusieurs années pour mettre des mots sur ce qu'il a vécu.

Ce premier livre est un exutoire qui lui a permis de régler ses comptes avec sa famille d’accueil, mais aussi avec lui-même, avec ses échecs et ses utopies. L’ouvrage est illustré par ses dessins et par des photos remontant aux faits, comme pour donner encore plus d’authenticité au récit. Aujourd’hui, Etienne se veut résolument combatif et parle de cet épisode douloureux avec philosophie: "Ce qui ne tue pas te rend plus fort" est un proverbe nietzschéen qu’il aime citer.

Devenu correspondant de presse en 2001, il a commencé par rédiger une version courte de cette histoire sur son blog. Puis il a trouvé un partenaire, Le Grand Chardon - Astobelarra, une association qui édite des textes courts en français et en euskara. "Les produits de la vente du livre reviennent intégralement à l'association pour la publication d’un prochain ouvrage dans les deux langues, Paroles de chef Seattle, explique l’auteur. Je suis heureux de contribuer à cette occasion au développement de la langue basque". Car si Etienne n’a pas réussi son intégration dans le milieu agricole, il a réussi son intégration en Soule où il vit toujours avec sa famille.

Sarah Hutter, le Journal du Pays Basque, 12/04/2008

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